charabia
Thami Benkirane, Maroc
29 août 2021
« Charabia », par définition, nous renvoie à un langage ou à une écriture au style incorrect, non-convenu voire incompréhensible. Par sa syllabe initiale, ce terme subsume une série photographique dans laquelle le chat est l’acteur principal. Elle a été réalisée à la faveur d’une promenade dans la médina, un 14 mars 2021. J’étais en mode « surimpression ». Je réalise mes superpositions au moment de la prise de vue et jamais en post-production. Cette contrainte m’oblige à trouver dans le contexte urbain où j’évolue tous les ingrédients qui vont composer la photographie.
Dans le cas de « Charabia », la première image enregistrée sur le capteur fut celle du chat, pris en contreplongée car il était situé dans la niche d’une fenêtre. Le chat regardait vers le haut et s’intéressait à des oiseaux qui piaillaient au-dessus de sa tête. La rue, en pente, était sombre et s’apparentait à un tunnel ouvert à une extrémité. Cette mise en abyme (présence d’un petit cadre dans un autre plus grand) ouvre sur la clarté du jour, sur l’animation des passants et sur les marches qui prolongent la rue. Plus proche du point de vue du photographe, un jeune garçon s’apprête d’un pas décidé à rejoindre le hors-champ de l’image. Au-dessus de sa tête un accent concave comme un V majuscule le pointe. D’autres tracés noirs participent au tissage de la photographie : il s’agit de graffiti photographiés sur l’un des murs blancs de la rue. Un mot écrit en arabe se répète plusieurs fois autour du chat : il s’agit de « زب ». Il se détache particulièrement sur la robe claire du chat. Ce graffiti en arabe désigne le membre viril de l’homme : « zob ». Avec lui, la frontière du tabou est franchie.
Dans l’ordre de la réalisation : il y a d’abord le chat, ensuite les graffiti et enfin la perspective de la rue et de son animation. L’ensemble constitue un charabia qui rappelle un collage.